Scrutin préférentiel pour le Canada

Les partis élisent leur chef avec un scrutin préférentiel 1,2,3. Élisons les députés de cette façon!

Lettre ouverte à Karina Gould concernant les résultats du sondage MaDemocracie.ca

Madame la Ministre Gould,

Nous aimerions aider à interpréter les résultats du sondage sur mademocratie.ca. Le sondage était un outil très utile pour comprendre ce que les électeurs canadiens souhaitent dans leur système électoral et dans leur Parlement, malgré ses lacunes.

Certains commentateurs ont dit que les résultats du sondage contenaient des contradictions. Nous ne sommes pas d’accord. Ils ne semblent être des contradictions qu’à ceux qui font des hypothèses sur le modèle de gouvernance que les électeurs préfèrent, et les questions du sondage étaient malheureusement souvent formulées avec une mentalité que les électeurs apparemment ne partagent pas. Pourtant, il y a suffisamment de données pour former une image claire.

Les priorités des électeurs sont les gouvernements qui tiennent compte de tous les points de vue, que les électeurs peuvent facilement sanctionner, et qui collaborent avec les autres partis. Ces priorités ont toutes trait aux normes de comportement du côté du gouvernement en Chambre, mais seulement parce que le sondage ne prévoyait aucune option pour les priorités qui s’appliquent au rôle de l’opposition. Pourtant, à l’aide de d’autres questions nous pouvons voir ce que les électeurs attendent des membres de l’opposition.

Le sondage ne portait pas directement sur la responsabilité personnelle des députés, mais uniquement sur la responsabilité collective des partis du gouvernement comparée à la responsabilité collective de partis multiples. 62% estiment que les gouvernements devraient négocier avec les autres partis, ce qui signifie nécessairement les partis d’opposition. Notamment, il n’y a pas de questions sur la collaboration entre les députés, plutôt qu’entre les partis. Les termes « négocier » et « partis » définissent le processus législatif en termes d’ententes entre des instances contradictoires, qui utilisent la discipline pour s’assurer que les députés suivront l’accord négocié pour eux, mais nous savons en regardant d’autres questions que les électeurs préfèrent clairement un modèle de gouvernance centré sur les députés où les partis n’imposent pas leur volonté aux députés.

Peut-être que les coopérateurs parmi les électeurs auraient préféré un modèle collaboration de différent, pas seulement entre les partis, mais parmi les députés. On doit constater que les mots « compromis » et « collaborer » ont obtenu une réception plus positive que le mot « négociation » plus antagoniste. Aussi absentes, les questions sur la collaboration entre deux partis gouvernementaux, le modèle privilégié par les partisans de la représentation proportionnelle, ce qui les laisse extrapoler à partir des réponses aux questions sur la collaboration entre le gouvernement et les partis d’opposition.

53% sont d’accord pour dire que les gouvernements, y compris les gouvernements d’un seul parti, doivent être redevables, contre 31% qui ne sont pas d’accord. Il n’y a pas de contradiction entre cela et le souhait que les gouvernements négocient, coopèrent et partagent la responsabilité. Les électeurs s’attendent à ce que les gouvernements gouvernent, tout en négociant et en coopérant. Bien que les questions ne concernaient malheureusement que la responsabilité des partis, les électeurs tiennent tous les députés responsables de jouer un rôle constructif dans notre gouvernance, qu’il s’agisse de députés du gouvernement ou de l’opposition. Cela ressemble à une responsabilité collective partagée, mais étant donné que le bout « concentré » de l’échelle du sondage est toujours la responsabilité collective d’un groupe légèrement plus petit, il se pourrait que les électeurs tiennent les députés individuellement responsables, quel que soit leur rôle. Le gouvernement est responsable de gouverner, mais l’opposition doit apparemment aussi assumer la responsabilité pour sa part dans les politiques adoptées.

La forme de la courbe sur le détail du bulletin de vote montre que les répondants étaient divisés dans la manière dont ils interprétaient la signification des questions; les questions claires ont rarement de telles dichotomies. Malheureux. Même parmi notre groupe d’experts, la plupart ayant des doctorats en sciences politiques ou d’autres domaines, il existait des opinions très divergentes sur ce que signifiaient les termes « facile à comprendre » ou « possibilités d’exprimer leurs préférences », et le contexte de « aussi simples que possible ».

La seule question claire dans cette section était le compromis entre exprimer des préférences multiples sur le bulletin de vote, et prendre plus de temps à comptabiliser. L’accord de 62% pour et 28% contre est une indication claire que le système actuel d’exprimer une seule préférence pour un candidat n’est pas satisfaisante, et probablement cela s’applique également à exprimer une seule préférence pour un parti. Les électeurs ont plus d’une seule préférence, et comme partisans des systèmes de vote préférentiel, nous sommes heureux de voir ce fait reconnu.

La série de questions sur la diversité, avec la série sur le taux de participation et le vote obligatoire, illustre pourquoi c’était une erreur que le questionnaire ne permettait pas de distinguer entre les valeurs des électeurs pour résoudre un problème et la volonté d’imposer ces valeurs à d’autres. Les Canadiens sont très désireux d’augmenter le taux de participation. Le sondage a proposé un instrument éprouvé pour atteindre cet objectif, un instrument coercitif, et les électeurs hésitent à approuver la coercition avec des peines non précisées.

Dans la section consacrée à la diversité de la représentation, aucun instrument n’a été proposé, seules des « mesures spéciales », un terme inquiétant. Il est raisonnable de supposer que les réponses dépendaient de l’interprétation si cela signifiait aussi des mesures coercitives et de quelles mesures ils imaginaient que les gouvernements pourraient imposer aux partis pour changer leurs processus de nomination des candidats. Nous croyons que ce manque de volonté d’imposer leurs propres valeurs à d’autres s’applique également aux systèmes électoraux. 123 Canada préfère les systèmes électoraux où les électeurs qui souhaitent être représentés par une entité collective comme un parti et les électeurs qui souhaitent être représentés par un individu sont tous les deux libres de voter en utilisant leurs valeurs; Nous ne voulons pas imposer un modèle axé sur les partis à ceux qui ne partagent pas ces valeurs.

Il est intéressant de constater que les Canadiens par une majorité écrasante veulent une diversité de points de vue au Parlement, mais ils ne veulent pas que ces opinions soient représentées par divers partis politiques. En fait, ils croient que les députés ne doivent pas simplement refléter la seule opinion de leur parti. Ils ne sont pas friands de partis, vraisemblablement petits, qui sont radicaux ou extrêmes, et en fait, ils ne sont pas friands de petits partis du tout. Ils accordent une faible priorité à une plus grande présence de petits partis au Parlement.

Il est très regrettable que le sondage n’aie porté que sur la représentation de points de vue divergents par des partis spécialisés, car ce n’est manifestement pas ce que veulent les Canadiens. Il existe d’autres façons de représenter une diversité de points de vue. L’une consiste à les faire représenter par une diversité de députés, même si ces opinions s’opposent à celles de leur parti. L’autre est que les députés eux-mêmes soient de bons représentants pour des opinions autres que la leur.

Aucun de ces résultats n’est une bonne nouvelle pour les partisans de la représentation proportionnelle. Le but et l’effet de la représentation proportionnelle est d’avoir des partis relativement étroits et homogènes, de donner plus de représentation aux plus petits, de s’assurer que les députés représentent ceux qui ont voté pour eux, et de négocier un programme avec les dirigeants des partis gouvernementaux, et où les députés sont élus en vertu de leur étiquette de parti et de sa discipline associée, avec aucun mandat personnel direct qui leur donnerait la légitimité pour s’éloigner de la ligne du parti.

Rien de tout cela ne correspond aux valeurs exprimées dans ce sondage. C’est surprenant car, bien que le sondage corrige pour les facteurs démographiques, il ne peut corriger pour le facteur d’auto-sélection de ceux qui sont plus motivés à participer au sondage parce que le système actuel ne donne pas les résultats qu’ils souhaitent.

Les résultats s’accordent particulièrement bien avec le point de vue de notre groupe sur la démocratie, où les députés sont redevables envers leurs électeurs et non envers leur parti.

Ce n’est pas un amour particulier des préférences multiples qui motive nos membres, ni une prédilection pour les bulletins de vote compliqués. Un système à deux tours, par exemple, n’a ni l’un ni l’autre. C’est un souhait que tous les candidats recherchent un consensus au sein de leur communauté, qu’ils engagent un dialogue avec les partisans de leurs adversaires et cherchent un terrain d’entente, et qu’ils représentent tous les électeurs, peu importe pour qui ils ont voté. Nous voulons un Parlement rempli de chercheurs de consensus. Nous voulons que les électeurs, et non les partis, déterminent ce qui est un consensus approprié, et nous voulons que nos députés, et pas seulement leurs partis, exercent la procuration démocratique que nous leur confions.

Nous voulons que les candidats aient à écouter attentivement ceux qui préfèrent des candidats impopulaires, et nous voulons que ces représentants individuels du consensus communautaire, et non les dirigeants des partis politiques des candidats impopulaires, s’engagent à représenter ces opinions minoritaires inconditionnellement avant les élections, pas attendre un coup de chance mathématique post-électoral pour parfois donner  une influence à un petit parti bien au-delà de ce que les électeurs lui ont donné.

Comme nous l’avons vu maintes fois, le vote préférentiel et à deux tours permet aux partis et aux indépendants respectés de se faire élire, mais empêche les partis radicaux et extrêmes d’avoir accès au pouvoir, puisqu’ils ne peuvent obtenir un consensus de 50 % + 1.

Le sondage va au-delà des systèmes électoraux et montre comment les électeurs veulent que les députés se comportent une fois élus : être plus collaboratifs, moins hostiles, moins disciplinés. Votre défi est maintenant de rendre cela plus facile à réaliser.

La réforme électorale est un des volets de sa réalisation et nous croyons que les réformes que nous avons proposées dans notre mémoire au comité seraient utiles, mais elle nécessite aussi des réformes démocratiques autres que les réformes électorales. Votre prédécesseur a fait un excellent travail en réduisant la dialectique contradictoire basée sur les partis au Sénat et en la remplaçant par une recherche plus concertée du bien commun. Les Canadiens semblent vouloir faire des changements dans la même direction à la Chambre des communes.

 

Cordialement,

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